HPI ou HPE ?
Quand on parle de Haut Potentiel, les données que l’on possédait jusqu’alors ont considérablement évolué. En effet, au début des années 1900, on se contentait de penser l’intelligence comme un système logique et pragmatique propre aux compétences de son cerveau. On pouvait la mesurer sur une échelle métrique.
Aujourd’hui, les connaissances en neurosciences, l'imagerie médicale et les recherches sur le sujet apportent un tout autre éclairage : il y existe plusieurs types d’intelligences, l’intellectuelle et l’émotionnelle.
L’intelligence : « Ensemble des aptitudes cognitives ou intellectuelles requises permettant d'acquérir des connaissances et l'utilisation de ces connaissances de façon efficace pour résoudre les problèmes dont l'objectif et la structure sont bien définis. » (Resing & Drenth, 2007)
Le HPI, ou le Haut Potentiel Intellectuel, renseigne sur les compétences cognitives ou le QI. Un simple test permet de le mesurer. Un QI au-delà de la moyenne nous informe sur les capacités intellectuelles du sujet mais aussi sur le fonctionnement du cerveau. A un certain degré d’intelligence, pour travailler correctement, le cerveau s'adapte. Il pense, interagit et travaille différemment. Grâce aux récentes recherches et au développement de l’imagerie médicale, on a pu constater visuellement cette forme de surefficience mentale si particulière, en arborescence notamment.
Un neurotypique pense de façon linéaire, une chose entraînant une autre, dans une logique rassurante. Le neuro-atypique, lui, pense en arborescence, c’est à dire qu'une pensée va s'associer à une autre pensée, transversale, complémentaire, parfois contradictoire. Un arbre de pensée se met en place pour une vision mentale globale d’une situation ou d’un problème. Cela rend la réflexion riche, dense et foisonnante.
Intelligence émotionnelle : “Habileté à percevoir et à exprimer les émotions, à les intégrer pour faciliter la pensée, à comprendre et à raisonner avec les émotions, ainsi qu’à réguler les émotions chez soi et chez les autres” (Mayer & Salovey, 1997)
Le HPE, ou le Haut Potentiel Émotionnel, concerne les compétences émotionnelles. Le QE ne sera conceptualisé que dans les années 1990, soit près de 100 ans après le quotient intellectuel. C’est pourquoi, aujourd’hui encore, beaucoup de questions se posent sur son existence, sa compréhension ainsi que son diagnostic.
Reuven Bar-on, psychologue, fut l’un des premiers théoriciens en matière d'intelligence émotionnelle. Il développa les premiers outils de mesures du QE en 1997. Pour cela, il a mis en lumière différentes caractéristiques telles que les composantes d’adaptabilité, intra-personnelles, interpersonnelles, de de la gestion du stress et de l’humeur générale. Les travaux et les recherches sur le sujet continuent d'intéresser les chercheurs du monde entier.
Aujourd’hui, par différents tests et questionnaires, l’évaluation du quotient émotionnel se précise et se confirme. Nous sommes maintenant en mesure de quantifier, de façon fiable, le degré de sensibilité d’un sujet.
Le monde qui entoure une personne à l’intelligence émotionnelle élevée n’est pas tout à fait le même que pour la majorité des gens. Toutes les interactions, qu’elles soient sensitives, sociales ou environnementales passent par les émotions. Le système limbique est le maître à bord. Pourtant, en cas d'hypersensibilité, aucun organe sensoriel ne serait plus développé. Il serait question d’un traitement accru par le cerveau des informations disponibles au sein d’un même environnement. Le HPE va comprendre, sentir, cerner une personne, un lieu ou une histoire, parfois, sans même savoir comment. Cette ultra-perception du monde rend les HPE extrêmement attentifs aux autres et à leurs émotions.
Et pourquoi pas les deux?
Loin d’être indissociable, le Haut Potentiel Intellectuel peut s’accompagner de Haut Potentiel Émotionnel. On peut tout à fait être l’un ou l’autre ou les deux. D'ailleurs, l’une des caractéristiques du Haut Potentiel Intellectuel est une sensibilité exacerbée. De la sensibilité importante à l’hypersensibilité, le chemin est plus court, forcément.
Ces deux formes de surdouances, l’une intellectuelle, l’autre émotionnelle, sont souvent complémentaires. C’est pourquoi, il est tout à fait possible de cumuler HPI et HPE. Quand l’un fait appel à la logique, l’autre fait appel à l’intuition et le va-et-vient entre les différentes parties du cerveau fait que, souvent, ces dernières travaillent en simultané et se développent ensemble.
Comment se diagnostique le Haut Potentiel Intellectuel ou Émotionnel ?
Pour le HPI, depuis le début du 20ème siècle, les tests de QI sont utilisés. Il en existe plusieurs en fonction de l’âge du participant. Ils sont remis à jour tous les 10 ans afin de coller aux évolutions sociétales.
Ils se composent d’une série de questions faisant appel à la compréhension verbale, le raisonnement perceptif, la mémoire de travail ainsi que la vitesse de traitement.
Ces tests sont des valeurs reconnues en termes de mesure de QI. Bien qu’il y ait une interprétation possible ou des tentatives d'auto-sabotages, on sait aujourd’hui qu'un test psychométrique est une référence lors de l’évaluation de l’intelligence d’un individu.
Pour le HPE, la jeunesse du concept et l’approximation des connaissances sur le sujet rendent son diagnostic encore délicat. Néanmoins, les chercheurs planchent ardemment dessus depuis une trentaine d’années maintenant. Les personnes hautement sensibles vont montrer des particularités cérébrales révélant des zones plus actives que d’autres.
Elaine Aron, psychologue et chercheuse, a mis au point un document de 27 questions qui permet à un individu d’évaluer sa sensibilité. Gare, tout de même, à l’effet “Barnum” (le fait de se reconnaître dans des descriptions assez générales) qui guette parfois dans l’enthousiasme de l’émergence de disciplines nouvelles. Les propriétés psychométriques de ce test sont cependant satisfaisantes, ce qui permet de déceler efficacement un sujet à haute sensibilité.
Que ce soit dans le diagnostic du HPE ou du HPI, un entretien psychologique auprès d’un professionnel de santé est recommandé afin de poser un diagnostic fiable.
Quelles sont les caractéristiques du Haut Potentiel ?
Le Haut Potentiel Intellectuel et le Haut Potentiel Émotionnel partagent beaucoup de caractéristiques (mentionnées ici par une astérisque) et en possèdent d’autres plus spécifiques à chacun.
En ce qui concerne les HPI, on retrouve très souvent :
- un sentiment de décalage*;
- une difficulté sociale*;
- une adaptabilité*;
- un vrai sens du beau et goût pour les arts*;
- le perfectionnisme et l’exigence*;
- une grande intuition*;
- une empathie élevée*;
- sensibilité à l’injustice*;
- un besoin de sens*;
- une pensée en arborescence ;
- une grande capacité de résilience ;
- une curiosité ;
- une grande créativité ;
- la recherche de la compagnie de personnes plus âgées ;
- une excellente mémoire factuelle ;
- une excellente communication verbale ;
- des passions dévorantes et intérêts multiples pour des sujets qui occupent beaucoup de temps dans la vie quotidienne ;
- un QI supérieur à 130 ;
- une hyperactivité cérébrale ou le syndrome Cerveau “en ébullition”, qui ne s’arrête jamais ;
- une très bonne mémoire à court et long terme ;
- un grand sens logique ;
- un manque de confiance et d’estime de soi, syndrome de l’imposteur très ancré ;
- une perte d’intérêt rapide, besoin de changement.
En ce qui concerne les HPE, on retrouve très souvent :
- un sentiment de décalage*;
- une difficulté sociale*;
- une adaptabilité*;
- un vrai sens du beau et goût pour les arts*;
- le perfectionnisme et l’exigence*;
- une grande intuition*;
- une empathie très élevée*;
- sensibilité à l’injustice*;
- un besoin de sens*;
- une hyperesthésie ou hypersensibilité sensorielle (aux sons, aux lumières, aux bruits ainsi qu’aux contacts physiques) ;
- une excellente mémoire émotionnelle (odeur, musique qui évoquent des souvenirs par exemple) ;
- une compréhension fine de la communication non-verbale ;
- une grande lucidité envers soi et les autres ;
- une capacité à s’occuper seul, ne s’ennuie pas ;
- une conscience corporelle exacerbée ;
- une grande capacité à se remettre en question ;
- une difficulté à contrôler son ressenti, impression de montagnes russes ;
- une certaine susceptibilité ;
- une réactivité élevée aux stimuli.
Quelles sont les difficultés rencontrées par les personnes à Haut Potentiel ?
Bien que chacun s’adapte aux spécificités de sa personnalité, il arrive que certaines personnes rencontrent des difficultés pour se comprendre, interagir avec les autres, voir juste évoluer de manière sereine dans son quotidien.
Le monde qui nous entoure est plutôt normé, jalonné de repères bien précis pour qui sait les comprendre. Or, ces personnalités neuro-atypiques peinent parfois à trouver leur marque. Certains s'adapteront parfaitement, tels des caméléons, et d'autres se sentiront incompris.
Dans ce dernier cas, l'aide d'unpsychologue en ligne par exemple pourra leur être utile. Le psychologue accompagne quotidiennement la personne à haut potentiel pour l’aider à se sentir mieux dans sa peau.
Christèle Albaret, psychosociologue et fondatrice de la Clinique E-Santé, s’exprime à ce sujet : “ Beaucoup de personnes ont besoin de soutien moral et de force dans ce contexte qui est le leur, et la thérapie digitale permet justement de ne pas mettre de limites à la guérison : le psychologue est disponible tous les jours. Les patients peuvent lui écrire en pleine nuit à travers l’application, ils auront une réponse en moins de 24 heures. Le psychologue est là, dans cette épreuve, avec eux, partout et jusqu’au bout. C’est un lien exceptionnel qui se crée”.
Les difficultés rencontrées par les individus à Haut Potentiel, qu’ils soient Intellectuels ou Émotionnels, peuvent ici être mises en commun.
Le faux-self : dans son désir d’adaptation et de se fondre dans la masse, et ainsi d’éviter toutes formes de rejet, le HP va se parer d’un faux-self. Telle une carapace sociale, ce faux-self, qui dans un premier temps peut s’apparenter à un masque social, peut finir par prendre définitivement et spontanément la place de la personnalité authentique et véritable.
L’anxiété : sous toutes ses formes, le HP expérimente l’angoisse et l'anxiété au cours de sa vie. En effet, l'hypervigilance, la conscience excessive de son environnement, de sa dangerosité ainsi que les nombreux stimuli sonores, olfactifs, auditifs sont autant de facteurs d’anxiété qui accompagnent les HP au quotidien. Apprendre à vivre avec demande du temps et des outils que, parfois, seul un spécialiste pourra fournir.
Hypersensibilité aux stimuli : les néons dans un bureau, les conversations des collègues, l’odeur d’un parfum, les supermarchés bondés et bruyants, tout cela les HP le vivent de plein fouet, sans filtre. Ils subissent leur environnement de façon frontale, sans échappatoire possible tant leurs sens sont à l'affût en permanence. Cela peut aller du simple désagrément au malaise physique parfois.
Hyperempathie débordante : la faculté de sentir l’autre et de percevoir ses émotions, peuvent devenir un cauchemar surtout quand le HP ne sait pas se préserver. Telle une éponge, le HP va s’approprier les émotions positives ou négatives qui l'entourent et les faire siennes, de quoi déstabiliser ou dérouter si l’on ne parvient pas à les dissocier de ses propres émotions. Les HP peuvent facilement se perdre et rentrer en dépression s’ils n’ont pas la capacité de différencier leurs émotions de celles des autres.
Solitude sociale et amoureuse : l’exigence et le perfectionnisme des HP conduisent nombre d’entre eux à une grande solitude affective. Ils sont aussi exigeants avec les autres qu’avec eux-mêmes certes, mais cela peut peser sur l’entourage et les proches des HP qui auront la sensation de ne jamais être assez bien. En effet, la demi-mesure, la tiédeur ne font pas partie de leur vocabulaire et ils ont des attentes presque impossibles à atteindre. Ils auront tendance à se replier sur eux-mêmes, entraînant une grande détresse affective ainsi que des difficultés pour mener une vie sociale épanouissante et une vie amoureuse équilibrée.
Proie idéale des manipulateurs et autres pervers narcissiques : Leur empathie exacerbée, leur syndrome du sauveur et le manque d’estime d’eux-mêmes font des HP les proies idéales pour les manipulateurs, ces derniers se nourrissant de leurs failles narcissiques.
Le rejet : La différence de traitement des informations qu’elles soient intellectuelles, sensorielles ou émotionnelles peut créer un décalage avec le reste de la population dite “normo-pensante”, provoquant potentiellement un rejet. Souvent, l’incompréhension et le manque d’empathie de leurs interlocuteurs créent un fossé qui ne peut être franchi par aucun des protagonistes car ils ne parlent pas le même langage. Cela peut avoir des répercussions dans la sphère personnelle mais aussi professionnelle et provoquer une souffrance énorme pour le HP.
Les troubles DYS et TDAH : Loin d’être anecdotiques, beaucoup de HP présentent des troubles additionnels qui peuvent handicaper leur quotidien. Un dépistage et une prise en charge précoce peuvent réduire les difficultés et ainsi éviter de les cristalliser à l’âge adulte.
Alors HPE ou HPI ? Quel que soit votre profil de personnalité ou vos atouts, vous êtes unique et c’est une force de se connaître soi-même pour exploiter le meilleur de ses compétences. Il est important de retenir que le Haut Potentiel n’est, en aucun cas, une pathologie mais un trait de caractère, envahissant parfois, compliqué souvent, mais riche et étonnant. Le fonctionnement du Haut Potentiel n’a pas encore été exploré dans sa totalité. Il arrive que la souffrance prenne toute la place tant ses particularités peuvent être difficiles à gérer au quotidien dans un monde fait par et pour les neurotypiques. Parfois, il suffit simplement de poser un diagnostic qui permettra, alors, de construire une nouvelle réalité plus apaisée.
La maxime des HPI et des HPE pourrait être: savoir qui l’on est, pour savoir où l’on va. Tout un programme !