La greffe est une opération chirurgicale dont la technique, en progrès permanent, est de plus en plus maîtrisée. La vraie difficulté, c’est que le nombre de donneurs n’est pas suffisant pour couvrir les besoins en greffons. Aussi les bio-ingénieurs sont devant un immense défi : comment fabriquer des tissus et des organes humains ?
Une équipe de chercheurs d’une université du Massachussetts vient de réussir des prodiges sur des feuilles d’épinards. La culture de cellules humaines in vitro n’est pas le plus compliqué. Le véritable obstacle réside dans le fait que ces cellules ont besoin des apports constants d’oxygène et de nutriments par le sang pour vivre et fonctionner. Alors comment créer le réseau sanguin adapté pour alimenter les cellules ? Même les systèmes d’impression 3D n’y sont pas parvenus pour le moment. Les chercheurs ont alors trouvé l’inspiration dans la nature. Ils ont observé que les feuilles d’épinards possèdent un minuscule réseau de nervures très semblable à la structure du système sanguin. Aussi, ils en ont profité pour y « semer » des cellules humaines.
Dans un premier temps, les feuilles d’épinards sont lavées de toutes leurs cellules propres par différentes solutions chimiques qui leur sont perfusées. Au bout de 7 jours, il ne reste de la feuille initiale que sa structure de cellulose transparente, son squelette en quelque sorte. La bonne nouvelle, c’est que la cellulose est facile à obtenir, peu coûteuse et compatible avec l’être humain ! Les chercheurs ont alors injecté un liquide coloré dans les feuilles, pour mettre en évidence les réseaux de petits vaisseaux et vérifier leur accessibilité. C’est ce qu’e l’on voit sur la plupart des clichés qui présentent leur découverte (ce n’est donc pas du sang).
Ensuite, les feuilles d’épinards ont été mises en contact avec des cellules humaines vivantes. Les cellules d’origine sanguine (cellules endothéliales) se sont installées dans le réseau intérieur à la feuille, tandis que les cellules d’origine cardiaque sont venues adhérer en surface. Au bout de 21 jours de perfusion, les chercheurs ont constaté que les cellules cardiaques se mettaient à se contracter spontanément comme elles l’auraient fait dans leur organe d’origine ! Le liquide coloré a permis de mettre en évidence les pulsations de la feuille.
Evidemment on est encore loin de fabriquer un cœur à partir de quelques cellules ! Il reste de nombreux points à éclaircir et à approfondir. Tout d’abord on ne sait pas si la cellulose de la feuille sera rejetée ou acceptée par le receveur. Ensuite on ignore encore les effets secondaires que pourraient avoir dans le corps de l’homme les résidus des produits employés pour « décellulariser » la feuille. Et puis il y a encore beaucoup à apprendre sur l’intégration de ce système vasculaire végétal dans le système vasculaire humain.
Pourtant les chercheurs entrevoient que la superposition des feuilles pourrait créer un pansement fonctionnel à greffer sur un cœur malade. Et ce serait un sacré progrès ! Et ils réfléchissent déjà à utiliser le bambou pour réparer un os brisé…
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