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les mots des peres 2

les mots des peres 2

Donner confiance

Point par point, le médecin déroule avec soin le fil des événements. Un éclairage qui a la vertu de rassurer et de décomplexer les participants : " Ils doivent sentir que ce moment leur appartient, souligne le médecin. Une séance est réussie quand les échanges sont fluides et que la parole circule librement. " C'est le cas ce soir. À une question sur la difficulté d'accoucher, il répond qu'il faut être en forme : " Un accouchement, c'est très physique, c'est fatigant. Mais pour nous c'est psychologique et notre tâche est d'être serein. Vous êtes ici pour acquérir de la sérénité. " " On préférerait que, pour nous aussi, ce soit physique " confie un futur père. Les autres acquiescent.

Manifestement, ces jeunes hommes sont un peu désemparés : comment bien faire, être à la hauteur de l'événement, sans en avoir la maîtrise ? Le médecin les encourage alors vivement à suivre la préparation à l'accouchement. " Plus vous serez prêts, plus vous pourrez donner confiance à votre compagne. Votre place est celle-ci : donner confiance ! "On se situe à quelle place ?

On saisit mieux l'importance de ces réunions lorsque le thème de la douleur est abordé. L'esprit du lieu souffle toujours sur les Bluets. Le docteur Girard en convient : la péridurale est un soulagement énorme, mais la préparation avec le travail sur le souffle qui permet de contrôler la douleur est loin d'être négligeable. " Nous avons multiplié les moments et les endroits de paroles et d'échanges entre le couple et l'équipe de la maternité pour que chacun puisse se libérer au maximum de ses craintes, explique-t-il en dehors de la réunion. De cette façon, tout est en place au moment de l'accouchement pour que les choses se déroulent harmonieusement. La part physiologique n'est pas parasitée par les angoisses que font peser l'histoire familiale, la société, parfois la relation avec le conjoint. "

Le groupe poursuit son cheminement avec, encore, des questions autour de la naissance : " Qui décide du moment de la péridurale ? " interroge un père. " Vous et votre compagne, bien sûr, même si nous nous servons de notre expérience pour vous guider. "" Concrètement, nous, on se situe à quelle place ? " " À côté de la mère : vous pouvez la soutenir, la réconforter." À chaque nouvelle question, les futurs pères sont renvoyés à leur position d'acteurs : "L'équipe médicale est là pour vous aider dans les moments difficiles, mais c'est vous qui accouchez !"

Plus personnelle, une question s'adresse directement au groupe. Elle concerne les relations dans le couple, au cours de la grossesse : " Ma femme a changé, elle est devenue irascible, elle est diffi cile à vivre et je suis la cible de sa nervosité ! C'est pareil pour vous ? " Beaucoup d'interventions suivent ces propos. Le ton est celui de la plaisanterie, mais la plupart s'accordent pour décrire les réactions imprévisibles de leur compagne. Derrière les rires, on devine un certain désarroi. " Je te conseille l'haptonomie ! ", suggère un des participants, " c'est génial, cela permet une relation détendue avec la mère et l'enfant. " Le médecin encourage cette approche de la naissance par l'haptonomie. D'ailleurs la maternité la propose aux futurs parents.

Quant aux transformations psychologiques de la mère, elles résultent notamment des changements hormonaux qui président à la grossesse et à la naissance. Aussi, quand on aborde le thème de la reprise de la sexualité après la naissance du bébé, le médecin avertit les jeunes pères : " Tout concourt naturellement à ce que l'attention de la mère soit tournée presque exclusivement vers l'enfant." Sous-entendu, les relations sont modifiées, et chacun doit trouver ses marques à l'intérieur de cette nouvelle parentalité. Mais pour les pères, il s'agit d'un apprentissage plus volontaire : " Dans la mesure du possible, soyez présents à la maternité pour apprendre à vous occuper du bébé et tisser un lien avec lui. De nos jours, il n'y a plus personne à la maison pour transmettre l'expérience. " À en juger par l'implication dans le groupe, le sentiment de paternité est déjà en germe chez les hommes présents ce soir. Les futurs pères viennent le remercier, on se serre la main, d'autres échangent des adresses d'acupuncteurs, ou se renseigne sur les méthodes de relaxation.

Durant un peu plus d'une heure et demie, ils auront parlé de leurs émotions, de leurs doutes, évoqué la césarienne, la sortie de la maternité, les maladies des nouveau-nés, l'influence de la lune sur les naissances et bien d'autres choses encore. De quoi se dire qu'un tel lieu, s'il n'existait pas, mériterait d'être inventé.

Article d'Isabelle Lacheref pour le journal de l'Ecole des Parents.

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