Cancer du poumon : ce chauffage au bois pointé par une étude, +43 % de risque et 40 000 morts par an au cœur du débat
Les flammes réchauffent, les fumées restent. Une nouvelle alerte scientifique relance la discussion dans les salons français cet hiver.
Poêle à bois, insert ou cheminée continuent d’attirer pour leur chaleur et leur image conviviale. Sauf que l’air intérieur n’oublie rien. Selon Santé publique France, le chauffage au bois représente 43 % des émissions nationales de particules fines, des composés capables d’atteindre profondément les bronches. Chaque année, environ 40 000 décès dans l’Hexagone sont attribués à la pollution de l’air.
Une étude épidémiologique publiée dans la revue Environment International remet un coup de projecteur sur un risque en particulier: un lien entre combustion de bois à domicile et cancer du poumon chez les femmes. Des chiffres qui bousculent les habitudes. Et ce n’est pas anecdotique.
Chauffage au bois en France : le chiffre de Santé publique France sur les particules fines qui interpelle
En 2025, le bois reste souvent un chauffage d’appoint prisé pour son confort. La réalité, elle, est moins chaleureuse. Les émissions issues de la combustion ne disparaissent pas quand les braises s’éteignent. Elles persistent dans l’air intérieur, se déposent, puis se remettent en suspension au moindre courant d’air.
Le chiffre clé, bien documenté, surprend toujours: 43 % des émissions nationales de particules fines viennent du résidentiel au bois. Ce poste pèse lourd alors même que, dans beaucoup de foyers, le feu n’est pas la source principale de chaleur mais un bonus convivial. Le risque est donc discret, diffus, quotidien.
Et les équipements récents ne gomment pas tout. Même des poêles modernes, mieux conçus, émettent encore des particules en quantité non négligeable lors de l’allumage, des recharges ou en fin de flambée. Les bons gestes limitent, ils n’annulent pas.
Étude Sister Study : ce lien entre chauffage au bois et cancer du poumon chez les femmes
La Sister Study, menée auprès de 50 000 femmes américaines ayant une sœur atteinte d’un cancer, a comparé les modes de chauffage domestique, dont le bois, le gaz ou le propane. Les résultats marquent un tournant pour la prévention en santé respiratoire.
Par rapport à celles qui n’y ont jamais recours, l’utilisation régulière du chauffage au bois est associée à une hausse de 43 % du risque de développer un cancer du poumon. Chez les femmes qui l’utilisent plus de 30 jours par an, ce risque grimpe à 68 %. Le signal est clair. Et il s’impose dans le débat français, où la place du bois reste culturelle.
Le docteur Suril Mehta, de l’Institut national des sciences de la santé environnementale des États-Unis et auteur principal, résume l’enjeu: "Notre étude démontre que même occasionnellement, la combustion de bois à l'intérieur, à partir de poêles et de cheminées, peut contribuer au cancer du poumon chez les populations où le bois n'est pas la principale source de combustible pour cuisiner ou se chauffer." Les scientifiques pointent notamment les hydrocarbures aromatiques polycycliques, le benzène et le 1,3-butadiène, des polluants connus ou suspectés d’être cancérigènes.
Pourquoi les femmes apparaissent-elles plus exposées dans ces travaux? D’abord, parce qu’elles passent, en moyenne, davantage de temps à la maison et se retrouvent plus souvent au contact de l’air intérieur. Ensuite, certaines différences physiologiques, comme des voies respiratoires plus étroites en moyenne, pourraient rendre les poumons plus sensibles aux particules fines. Longtemps, l’exposition domestique féminine a été sous-estimée dans les études environnementales. Ce biais est en train de bouger.
Air intérieur et femmes : les gestes concrets pour réduire le risque à la maison
On ne va pas renoncer du jour au lendemain aux veillées près du feu. Mais on peut réduire l’exposition. Première règle simple: aérer. Dix minutes, deux fois par jour, fenêtres grandes ouvertes, suffisent à renouveler l’air et à faire chuter la concentration de particules, même en hiver.
Ensuite, l’entretien. Le ramonage, obligatoire deux fois par an, limite les émissions et assure un tirage efficace. C’est une question de sécurité, c’est aussi une question de santé. Mieux vaut également choisir un appareil performant: les poêles et inserts labellisés Flamme Verte rejettent beaucoup moins de polluants qu’un modèle ancien. Et, très concrètement, privilégier un bois sec, non traité, avec un taux d’humidité inférieur à 20 %, réduit la fumée toxique à la combustion.
Le rythme d’usage compte aussi. Limiter la fréquence d’utilisation du chauffage au bois, particulièrement les jours de mauvais dispersion atmosphérique, évite d’additionner les expositions. L’idée n’est pas d’interdire, mais de choisir les bons moments. Si le logement le permet, combiner avec une pompe à chaleur ou un système électrique récent diminue la part des particules liées au bois.
Pour celles et ceux qui envisagent de passer à un équipement plus propre, l’Agence nationale de l’habitat propose des aides financières pour remplacer un ancien poêle ou un insert par un appareil plus performant. Mieux vaut se renseigner avant de lancer les travaux, quitte à remplacé son poêle à l’intersaison pour préparer l’hiver suivant.
Reste un dernier réflexe utile: surveiller l’air intérieur après une flambée. Éviter d’ouvrir la porte du foyer quand le feu couve, laisser le combustible finir de brûler, et attendre avant de manipuler les cendres, qui remettent des particules en suspension. Ce sont des détails, et pourtant ils font la différence dans la durée.