Ce poêle à bois plébiscité par 7,4 millions de foyers pourrait nuire aux poumons comme le tabac, selon des pneumologues européens

Mis à jour le 1 novembre 2025

Chaleur, odeur de bois, ambiance cocooning: l’image est parfaite. Mais derrière la vitre du foyer, une autre histoire s’écrit.

En France, le poêle à bois s’est imposé comme une valeur refuge. En 2020, 7,4 millions de ménages en possédaient déjà un, dopés par la flambée des prix de l’énergie et l’image d’un combustible présenté comme renouvelable. En 2025, la tendance perdure: on aime le charme de la flamme et l’idée d’une chaleur locale, au plus près du salon. Et pourtant, le tableau se nuance sérieusement quand on regarde ce qui se passe dans nos bronches.

Au dernier congrès de la Société européenne de pneumologie, à Amsterdam, une équipe a présenté des résultats qui interpellent. Les chercheurs ont croisé l’usage domestique des poêles au Royaume-Uni avec des données de santé suivies plusieurs années chez des personnes âgées. Leur boussole: le VEMS, l’indicateur qui mesure la quantité d’air expulsée en une seconde. Les résultats font tiquer.

Ce que la science européenne révèle sur le poêle à bois et le VEMS

Les auteurs ont d’abord dû écarter un biais: dans les données, les utilisateurs de poêles étaient souvent plus aisés et en meilleure santé. Sauf que, sur huit ans de suivi, ceux qui utilisaient régulièrement un poêle affichaient un VEMS plus faible et un déclin respiratoire plus rapide que les autres. Le lien entre combustion du bois à la maison et baisse de la fonction pulmonaire apparaît net, y compris chez des personnes en forme au départ.

La piste incriminée, ce sont les particules fines émises par la combustion. Elles pénètrent profondément dans les poumons et irritent les voies respiratoires. Comme le résume l’auteure principale, le Dr Laura Horsfall: "provoquent une inflammation de manière similaire à la fumée de cigarette". Et elle insiste sur la nature des polluants en jeu: "Nous savons que la combustion du bois à domicile émet une pollution atmosphérique nocive, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, notamment des substances cancérigènes connues".

En France, l’enjeu de santé publique est bien réel. Selon Santé publique France, la pollution atmosphérique liée aux particules fines et au dioxyde d’azote, notamment issues du chauffage au bois, provoquerait chaque année plus de 22 000 nouveaux cas de BPCO et plus de 4 000 cas de cancer du poumon. Des chiffres qui remettent en perspective l’attrait d’une chaleur conviviale quand l’air du salon devient moins respirable.

Le détail méconnu qui change tout entre un ancien poêle et un modèle éco-conçu

Tout ne se vaut pas côté appareils. Les données présentées distinguent des profils très différents selon l’âge du poêle, son entretien et sa conception. Les modèles anciens, mal réglés ou mal entretenus, émettent beaucoup plus de particules. À l’inverse, les poêles européens récents dits éco-conçus promettent une combustion plus complète et des rejets réduits. Mais gare au sentiment de sécurité absolue. Comme le rappelle le Dr Laura Horsfall: "Bien que les nouveaux poêles à bois européens éco-conçus soient généralement considérés comme plus propres et plus sûrs que les poêles à bois plus traditionnels, de nombreux foyers européens utilisent encore des poêles à bois plus anciens, et même les poêles les plus récents peuvent ne pas être totalement sans risque".

Concrètement, l’écart d’émissions entre générations d’appareils ou d’énergies est frappant. Les chiffres ci-dessous donnent un ordre de grandeur utile quand on hésite à moderniser son installation:

  • Poêle à granulés moderne: environ 0,25 g de particules fines par heure.
  • Poêle à bois récent: environ 0,5 g de particules fines par heure.
  • Ancien poêle à bois (avant 1996): jusqu’à 2,6 g de particules fines par heure.
  • Durée de suivi de l’étude présentée: 8 ans, avec un déclin du VEMS plus rapide chez les utilisateurs réguliers.

On le voit, passer d’un vieux foyer à un modèle éco-conçu réduit sensiblement les émissions. Et un poêle à granulés fait bien mieux encore sur ce critère précis. Pas un détail quand on a de jeunes enfants, un parent asthmatique ou des voisins proches.

Quelles alternatives et aides en France pour réduire les fumées chez soi

Si vous tenez au charme de la flamme, le poêle à granulés coche plusieurs cases: moins de rejets, une température plus stable, et une utilisation plus simple au quotidien. D’après des données fabricants, il émet en moyenne 0,25 g/h de particules, contre 0,5 g/h pour un poêle à bûches récent. Face aux anciens appareils, l’écart grimpe à un facteur d’environ dix. Et puis, l’approvisionnement en granulés se standardise, ce qui facilite la vie quand le froid s’installe.

Vous préférez rester au bois-bûches ? Alors ciblez un poêle récent éco-conçu, entretenez-le soigneusement et soignez les gestes: bois bien sec, allumage inversé, tirage équilibré, ramonage régulier. Ce combo limite les émissions et améliore le rendement. Autre point à surveiller: l’étanchéité du conduit, à vérifier chaque année pour éviter que le foyer ne s’encrasse et finisse par mal brûler. Oui, ces réflexes demandent un peu d’organisation, mais ils payent vite.

Reste la question du prix. Remplacer un appareil ancien par un modèle plus performant peut coûter cher… sauf qu’il existe des coups de pouce. Le dispositif MaPrimeRénov’ peut financer une partie de l’achat d’un nouvel équipement en fonction des revenus, avec un soutien allant jusqu’à 2 500 € pour les ménages modestes. De quoi franchir le pas vers un appareil plus récent, moins cher à l’usage et, surtout, moins émissif. Et, au besoin, vous pouvez revenir vers l’installateur pour être rembourser d’un réglage qui n’aurait pas été correctement effectué.

Au final, on ne parle pas d’interdire le poêle à bois, mais de réduire l’exposition aux particules fines chez soi. Entre un ancien appareil et un modèle éco-conçu, l’écart de fumées change radicalement l’air qu’on respire au quotidien. Et quand l’hiver s’invite, c’est bien là que tout se joue.