Limaces au potager : ce geste à contre-courant a transformé ce jardin ravagé en oasis de salades intactes
Un matin de printemps, un jardinier retrouve ses salades lacérées, les feuilles couvertes de bave. Plutôt que de repartir en croisade contre les baveux, il tente autre chose : installer, à l’écart des planches, des assiettes de légumes fatigués pour les attirer. Son jardin cesse peu à peu d’être un champ de bataille.
Dans un climat humide où les limaces au potager sont vues comme l’ennemi numéro un, beaucoup misent encore sur cendres, coquilles d’œufs ou pièges à bière. Ces recettes déçoivent souvent, les baveux continuent de grignoter les salades et l’on finit par se croire condamné à la guerre totale.
Limaces au potager : ennemies ou alliées cachées ?
Les limaces se concentrent là où le sol est meuble, riche en humus et couvert de végétaux variés, bref un potager vivant. Composées à 80 % d’eau, elles passent 90 à 95 % de leur temps sous terre et ne sortent que lorsque l’air est bien humide, surtout la nuit.
Autre surprise, leur menu. "Elle mange principalement (à plus de 98%)… des champignons", explique la jardinière Guylaine Goulfier sur Oh! Un jardin. Les limaces dévorent les champignons qui décomposent paillis et déchets, mais aussi les champignons pathogènes : "Elles dévorent ainsi le botrytis, l’oïdium, septoriose, cladosporiose et autres oïdiums." En digérant leurs spores, "Elles limitent donc la prolifération et la dispersion des maladies".
Nourrir les limaces pour sauver le potager
Pourquoi alors ces dégâts sur semis et salades neuves ? C’est là que la biologie tranche. "Il lui manque une enzyme digestive et celle-ci se trouve dans certains jeunes tissus végétaux." Les limaces raffolent donc des graines qui germent, des plantules et des feuilles très tendres, bien plus que des plants adultes lignifiés, beaucoup moins intéressants pour elles.
Pour détourner cette fringale, des jardiniers choisissent de nourrir les limaces à distance des cultures. Au printemps, ils installent sous une planche ou une coupelle des feuilles flétries de salade, des épluchures de pommes de terre, des courgettes abîmées, qu’ils renouvellent tous les deux ou trois jours. Autre astuce : leur offrir une verdure tampon à grignoter.
- Semer de la moutarde en engrais vert.
- Installer une ligne serrée de laitues à couper.
- Entourer les cultures sensibles d’un mélange roquette, pourpier, cerfeuil, cresson.
Limiter les dégâts sans casser l’équilibre du jardin
Reste à éviter de transformer le jardin en palace pour gastéropodes. Les gros paillages de paille ou de BRF, riches en carbone et toujours frais, offrent sol humide, champignons et refuges contre les prédateurs : la population explose. Mieux vaut de fines couches de tontes ou de feuilles, associées à des couverts végétaux vivants et à un arrosage plutôt matinal.
Pour les situations vraiment critiques, certains gardent un filet de sécurité. Depuis la loi Labbé de 2019, les particuliers n’utilisent plus que des granulés au phosphate ferrique, qui bloquent la digestion des gastéropodes puis se transforment en fer assimilable pour les plantes. Comme le rappelait Paracelse, "Tout est poison, rien n’est poison, c’est la dose qui fait le poison". Une fine couronne de granulés autour des cultures très attractives, combinée au nourrissage déporté et aux prédateurs naturels, suffit à réguler sans tout empoisonner.